Je ne me rappelle pas, mais mon cœur se souvient de toi... (Flynn)

Je ne me rappelle pas, mais mon cœur se souvient de toi...

Le bazar. C'était littéralement le bazar dans sa vie, dans son esprit et voilà que, depuis un certain temps maintenant, c'était aussi le bazar dans son cœur. Ce dernier, assailli par une multitude de sentiments contradictoires, lui rendait l'existence foutrement dure et il détestait cela ! Ne pas avoir plus de contrôle sur ce qu'il ressentait le rendait nerveux, car la dernière fois qu'il avait ressenti un tel trouble, il avait réalisé qu'il tombait amoureux... Depuis, il n'avait jamais plus ressenti une telle chose et son amour n'avait jamais failli. Ni par l'usure du temps, ni même par les refus catégoriques - et plus ou moins constant - de l'être qu'il convoitait depuis si longtemps maintenant.

Alors, pourquoi diable était-il si empreint au doute à présent ? Qu'avait-il bien pu se passer entre temps, de suffisamment important, pour faire naître dans son esprit tant de questionnement ? Pour mener inlassablement ses pas ici, dans ce Jazz Club, comme s'il espérait que les réponses ne lui tombent du ciel ou qu'un beau jour, quelqu'un ne daigne s'asseoir près de lui et lui dise Hey toi, je sais ce qui te contrarie. Et si tu me laissais éclairer ta lanterne ? Archibald savait pertinemment que c'était stupide. La plupart des gens avaient, tout comme lui, oublié des pans entiers de leurs existences. Sans compter que, dans la vraie vie, il était rare que les gens vous viennent comme des fleurs pour éclairer vos lanternes.

Lasse, l'immortel avala d'une seule traite le fond du Bourbon qui s'agitait encore dans le creux de son verre, après qu'il l'ai tourner et retourné entre ses doigts, avant de finalement se lever dans l'idée de quitter les lieux. Mais ce fut exactement au même instant que son regard se porta sur le nouveau venu. Archibald ne le connaissait pas, il en était persuadé. Pourtant, il demeura là, stoïque en le regardant s'installer.

Qui était il et pourquoi attiré il autant son attention, à tel point qu'il ne semblait pas pouvoir détourner son regard de lui ? Honnêtement ? Archibald n'aurait pas su le dire avec certitude en revanche, son corps se refusait à présent de partir. Choisissant alors de reprendre sa place initiale, refusant tout bonnement d'aller à l'encontre du pressentiment encore flou qui venait si brutalement de s'emparer de lui, il resta là. Silencieux et, bien moins discret qu'il ne l'avait sans doute imaginé, il observait...

Codage par Libella sur Graphiorum

Je n'aimais pas ne pas me souvenir de ce qui s'était passé. Bien sûr j'avais déjà un peu trop abusé sur la boisson et je m'étais réveillé sans souvenir de la veille, mais là on parlait des six derniers mois. Soit j'avais pris la cuite du siècle, ce dont je doutais fortement soit quelque chose d'autre était à l'oeuvre et je n'aimais pas ça. Pas plus que les divers bandages qui me couvraient le torse, le bras gauche et la cuisse droite. La douleur qui s'en échappait ne pouvait être calmée que par des antidouleurs que j'enchainais comme des bonbons.

Évidemment j'avais voulu obtenir des réponses auprès de mes supérieurs qui s'étaient bien gardés de s'allonger sur le sujet. J'avais décrypté qu'il n'avait aucune idée non plus de ce qui pouvait se passer. Une chose était sûre, seuls les membres du brotherhood qui était en mission à la Nouvelle Orléans étaient concernés par cette amnésie. Le seul ordre que j'avais reçu était de rester sur mes gardes et de me reposer.

Je détestais devoir rester statique, sans rien faire. Bloquer entre les quatre murs de mon appartement. Heureusement je ne vivais pas seul, mais avec Elena Gilbert. Elle non plus n'avait aucune idée de ce qui s'était passé. Depuis la mission pour la sortir de l'antre des Mikaelson elle avait élu domicile chez moi. Rien ne s'était passé évidemment si j'avais tendance à ne pas m'attacher et multiplier les relations sans lendemain, mes missions étaient hors limites. Je ne dormais que très peu, ce qui affectait ma convalescence. Puisque je ne pouvais plus faire mon travail pour le brotherhood je dessinais.

Dans tous mes croquis un visage revenait sans cesse. Toujours le même sous différents angles. Parfois les époques divergeaient. Je l'avais dessiné par le passé dans les années quatre vingt, une veste en jean, une coupe mullet. Je partais sur un paysage, sa silhouette était là, il n'y avait aucun moyen de savoir si c'était la même personne ce n'était qu'une silhouette noire. Pourtant je savais. Le pire dans toute cette histoire, dès que je le dessinais une image m'apparaissait, celle d'un lieu spécifique de la Nouvelle-Orléans.

Cette fois encore, alors que je dessinnis ses yeux, une image s'imposa à moi, celle d'un endroit, le maison bourbon jazz club. Je le voyais là, assis, un verre à la main. Cette fois je devais en avoir le coeur net. Je rangeais mon calpin dans la poche arrière de mon jean. J'enfilais une veste en cuir noire en évitant soigneusement de me regarder dans un miroir, je savais que je faisais peur à voir. Entre la pâleur inhabituelle de mes traits qui faisait ressortir le noir de mes tatouages sans oublier les cernes mauves sous mes yeux. Je glissais quelques dagues de ma confection à l'intérieur de ma veste, amener un arc dans un jazz club aurait attiré l'attention.

J'avais pris ma voiture pour me rapprocher du centre-ville. Arrivé je prenais une nouvelle fois un antidouleur. Si habituellement Vanessa Morehead me soignait quand j'étais trop endommagé, le fait que je ne sois pas allé la voir après ce genre de blessure ne me rassurait pas. Pourtant je devais obtenir des réponses à mes questions et j'étais certains que ce type que je dessinais depuis plusieurs jour y était pour quelque chose.

Une fois à l'intérieur je m'arrêtais au premier tabouret contre lequel je reprenais mon souffle. Je sortis mon calepin pour chercher la bonne table et je croisais le même regard que j'avais dessiné de nombreuses fois. De trop nombreuses fois. Je n'allais pas repartir sans réponses, au pire je passerais pour un fou. Je grognais autant à cause de la douleur que de ma mauvaise humeur.

- Je suis pas doué pour tout ce qui touche aux relations sociales. Alors je vais être direct...

Je posais le calepin avant de le faire glisser dans sa direction. Évitant soigneusement son verre qui sentait le bourbon. J'en profitais pour prendre place sur une chaise, en essayant de cacher une grimace de douleur. Il n'y avait pas cinquante solutions, soit on s'était rencontré pendant l'amnésie, soit c'était lui qui m'avait mis dans un état pareil. Dans les deux cas, je ne savais pas quoi penser.

- Vous pouvez le fouiller, j'aimerais juste que vous m'expliquiez comment on se connaît et pourquoi je n'arrête pas de vous dessiner.

Je ne me rappelle pas, mais mon cœur se souvient de toi...

Bien que l'alcool n'avait plus véritablement d'effet sur lui et ceux depuis près de cinq cents ans maintenant, Archibald n'avait pas pour autant perdu l'envie d'en consommer. Et le goût agréablement fumé de ce Bourbon, ne faisait que l'encourager à continuer. Pourtant, avant aujourd'hui, il avait toujours - plus ou moins - apprécié de ne plus connaître l'ivresse. Mais aussi étrange que cela puisse paraître, il aurait presque aimé l'être en cet instant. En vain. Alors il se contenta simplement de l'observer. D'observer cet homme qui avait littéralement capté toute son attention en entrant ici, l'obligeant indéniablement à se rasseoir alors qu'il était sur le point de partir. Cet homme qui semblait l'observer lui aussi alors qu'il se rapprochait dangereusement de lui. Archi fut bien tenté de regarder derrière lui afin d'être certain que c'était bien vers lui qu'il s'avançait. Mais il n'aurait rien trouvé d'autres qu'un mur s'il l'avait fait.

Silencieux, ne sourcilla pas. Pas davantage lorsque celui-ci posa son carnet sur la table avant de le faire glisser jusqu'à lui. D'une main, il le retient. Perplexe à présent, il ne l'ouvrit pas tout de suite. La curiosité le rongeait, mais il fut bien plus interpellé par les propos de cet homme qui venait de prendre place à sa table. Le détaillant d'un peu plus près, il semblait toujours convaincu de ne pas le connaître, alors pourquoi diable son cœur de mort-vivant s'emballait-il à simple vu de celui-ci ?

Grand, élancé. Brun de cheveux et de jolis yeux noisettes qui trahissaient néanmoins sa mauvaise humeur. Il était plutôt beau à regarder et à dire vrai, ce n'était peut-être pas si étonnant finalement que son cœur s'emballe en le voyant.

- Je suis flatté. Dit-il en se décidant enfin à ouvrir le calepin.
- En revanche, je n'ai pas la moindre idée de ce qui vous pousse à me dessiner. Avoua-t-il, les sourcils froncés.

Continuant de feuilleter le carnet, de plus en plus intrigué, il ne pouvait néanmoins nier que ce garçon avait beaucoup de talent et que ces portraits ne lui faisaient guère défaut.

- Je n'ai pas l'impression de vous connaître. J'étais sur le point de partir et puis... Je vous ai vu. J'ignore pour quelle raison, mais d'une façon ou d'une autre, cela m'a retenu ici. Lui confia t-il, conscients que cela n'avait aucun sens.

Il laissa ensuite son regard courir sur les contours de cet homme, à la recherche de quelque chose. Un signe distinctif, une marque, un bijou ou Dieu ne sait quoi d'autre qu'il pourrait peut-être reconnaître, le mettre sur la voie. Mais rien ne lui sauta aux yeux hormis le fait que son épaule semblait lui faire souffrir le martyre, et cela, bien qu'il se donnait beaucoup de peine pour ne pas qu'on y prête grande attention.

Codage par Libella sur Graphiorum

Je n'aimais pas cette histoire d'amnésie. Vu l'état dans lequel je m'étais réveillé, j'avais songé que cette amnésie était un symptôme. Sauf qu'avant le quatorze février je me souvenais de tout. Et ma tête contrairement au reste de mon corps étaient intactes. Ce n'était pas une rencontre entre une pierre et ma tête qui avait réussi cet exploit. Je ne pouvais pas être hypnotisé par les vampires dont ce n'était pas eux non plus. Il me restait l'option de la magie, mais ça aussi j'étais plus ou moins immunisé contre. Mais c'était la meilleure option pour le moment alors je restais en retrait vis-à-vis des sorcières de la Nouvelle-Orléans tout en partageant mes soupçons avec les membres du Conseil.

Ma mission ici suivait son cours, j'avais la sensation de ne pas servir à grand chose dans cet état, bourré de médicaments, du sommeil à rattraper qui ne venait pas et des blessures qui ne cessait de s'ouvrir de nouveau parce que je ne savais pas rester tranquille. Et ce portrait que je dessinais sans cesse. Qui ressemblait trait pour trait à l'homme que j'avais en face de moi. Fatigué, bougon et excédé je voulais en savoir plus. Pour le bien de ma santé malade j'avais besoin de réponse. Ça devait être étrange de me voir débarquer comme ça, couvert de tatouage noir et un carnet de dessins à la main que je lui avais balancée. Lui précisant que les relations sociales et moi ça faisait deux dans le meilleur des cas.

- Je suis flatté.

- Félicitations, mais c'est pas une réponse ça.

Ce n'était pas la réponse que j'attendais. Il feuilletait le calepin pendant que je l'observais en fouillant ma mémoire, rien ne me revenait. Comment j'aurais pu oublier quelqu'un que je passais mon temps à dessiner. Une ancienne mission peut être ? C'était un combat contre lui qui m'avait laissé dans cet état ? Ce n'était pas la première fois que tu te battais contre... Qu'est-ce qu'il était déjà ? Je l'ignorais, mais c'était une piste, si je savais ce qu'il était peut être que les pièces du puzzle se remettraient en place. J'étais certain que ce n'était pas un simple humain. Un humain n'aurait jamais pu me faire autant de dégâts c'était juste impossible.

- En revanche, je n'ai pas la moindre idée de ce qui vous pousse à me dessiner.

- C'est bien mon problème.

J'étais certain que ce n'était pas simplement dû au hasard. Comment ça pourrait l'être alors que je le dessinais visiblement depuis un bon moment et avec autant de précision. Il devait savoir quelque chose, j'aurais peut être dû commencer par me présenter ?

- Je n'ai pas l'impression de vous connaître. J'étais sur le point de partir et puis... Je vous ai vu. J'ignore pour quelle raison, mais d'une façon ou d'une autre, cela m'a retenu ici.

- Et vous êtes quoi ? Vous parlez comme si vous n'étiez pas de ce siècle tout en essayant de le cacher alors je paris sur vampire ou hérétique.

Est-ce que c'était lui qui t'avait fait passer un sale quart d'heure. Si c'était vraiment lui et qu'il ne s'en souvenait pas, le titiller n'était peut-être pas la meilleure des idées. Puis je songeais à la blessure que j'avais à l'épaule, elle était faite par un carreau d'arbalète. Pourquoi un vampire aurait-il eu besoin d'une arme ? Ma main s'avança vers son verre, ma solution pour faire taire cette douleur lancinante dans mon épaule ? Boire jusqu'à ne plus rien sentir.

- Je me permets.

Et avec ses quelques mots je pris une gorgée du liquide ambrée espérant que cette douleur finisse par te passer. Il était trop tôt pour m'enfiler un autre antidouleur, bien trop tard pour rentrer chez moi. J'avais bien l'intention de découvrir ce qui se tramait sous ses portraits.

Je ne me rappelle pas, mais mon cœur se souvient de toi...

En plus de cinq cents ans, peu d'hommes avaient réussi à l'intriguer de la sorte. Il avait toujours fait partie de ses êtres capables d'aimer - ou du moins, capable d'éprouver quelque chose à l'égard de quelqu'un sans guère se soucier de son apparence physique. Il avait donc déjà eu le béguin autant pour une femme que pour homme, bien que le seul et unique qu'il ait véritablement aimé et qu'il continue de chérir aujourd'hui encore, n'était autre que Rory - sans qui, au passage, il ne serait pas là aujourd'hui. Personne ne semblait pouvoir l'égaler et au fond, il n'était pas certain de vouloir que quelqu'un soit capable de le faire. Parce qu'au fond de lui, il avait toujours espéré que Rory finisse par faire de lui le seul et unique amour de sa vie, même s'il avait parfaitement conscience du fait que Rory n'en soit probablement jamais capable puisque ce dernier avait le cœur bien trop grand pour n'en aimer qu'un seul à la fois. Il ne le lui avait jamais reproché. Et continuait en dépit de tout à attendre. Il y avait aussi, un côté étrangement réconfortant dans cette situation, car le fait de s'amouracher désespérément à un seul et même être, lui éviter de se mettre à nouveau en danger. Voilà pourquoi, s'il lui arrivait de voir quelqu'un d'autre - tout comme Rory pouvait aisément le faire - il ne donnait jamais vraiment de sa personne et ne cherchait jamais non plus à revoir ou à revivre cette aventure.

Et pourtant... Cet homme en face de lui, semblait avoir fait la différence d'une façon ou d'une. Il ignorait s'ils avaient réellement vécu quelque ensemble durant cette période d'oubli, ou plus d'un semblaient avoir littéralement oublié un pan entier de leur existence - lui y comprit. Mais ce qui lui apparaissait désormais comme une évidence, c'était cet homme. C'était lui, pour lui, qu'il n'avait de cesse de se rendre dans cet endroit. C'était lui qu'il espérait tant trouver en venant systématiquement dans ce club. Maintenant, il se devait de trouver le pourquoi, encore très nébuleux, qui pouvait expliquer cela.

Puis un sourire narquois vient se dessiner sur le coin de ses lèvres lorsque son homologue le félicita, non sans une once de sarcasme dans la voix. Ce n'est clairement pas le genre de réponse qu'il attendait. Continuant de feuilleter le petit carnet, Archibald pouvait presque sentir le regard de cet homme sur lui. Visiblement, il semblait l'intriguer autant que lui-même pouvait l'intriguer. Cherchait-il lui aussi quelque chose, n'importe quoi, susceptible de raviver sa mémoire ?

- Et vous êtes quoi ? Vous parlez comme si vous n'étiez pas de ce siècle.
- Parce que je n'en suis pas, tout simplement.
- Alors je parie sur vampire ou hérétique.
- Vous êtes perspicace. Peut-être un peu trop. Souligna-t-il en évitant soigneusement de confirmer l'une ou l'autre de ses suppositions.

De son côté, il aurait parié sur un chasseur. Il avait l'air bien trop renfrogné et en possession de bien trop d'informations sur les êtres comme lui pour n'être qu'un humain lambda. Et puis, un homme simplet n'aurait sans doute pas pu se faire le genre de blessure qui semblait lui marteler l'épaule. Archibald ne pouvait pas vraiment la voir sous ses vêtements, mais au vu des grimaces qui étrier parfois son beau visage, il ne pouvait que se doutait qu'il ne s'agît pas d'une simple égratignure. Comment diable avait-il pu se faire autant de mal ? Après tout, c'était peut-être bien ce qu'il cherchait à savoir ? Et si finalement, il était là uniquement pour ça ? Était-il possible qu'il cherche à savoir si c'était Archi' qui était responsable de ses maux ? Soucieux, il se laissa doucement happer par le cours de ses réflexions, ne remarquant alors, que tardivement, la main qui s'était avancée vers son verre de Bourbon.

- Je me permets. Avait-il dit en portant le verre à ses lèvres.

Archibald n'aurait pas su expliquer pour quelle drôle de raison, il trouva ce simple geste incroyablement sexy, mais cela lui arracha un nouveau sourire, plus espiègle que le précédent avec une pointe de surprise peut-être.

- Faites donc. Souffla-t-il tout en cherchant un serveur du regard. S'ils devaient tous les deux partir à la chasse aux souvenirs et si, par la même occasion ce garçon pouvait ne serait-ce qu'un instant oublier sa douleur, peut-être qu'une bouteille ne serait pas de trop à cette table. Bien qu'Archibald n'était pas tout à fait certain que ce soit une excellente idée pour lui que de s'enivrer s'il prenait des médicaments. Mais il pouvait toujours s'arranger pour être celui qui boirait le plus ?

- Alors, c'est à cause de ça que vous êtes là ? Questionna-t-il en faisant référence à son épaule douloureuse.
- Vous pensez que c'est moi le monstre qui vous a fait ça, n'est-ce pas ?

Codage par Libella sur Graphiorum

Je détestais les questions laissées sans réponses. Alors je ne supportais pas de ne pas savoir ce qui avait pu se passer avec cet être que je ne pouvais plus me sortir de la tête au point de le dessiner sur chaque petit morceau de papier que je trouvais. Comme si mon inconscient essayait de me faire passer un message. J'avais un pouvoir de localisation qui venait avec ma fonction de chasseur, alors j'en avais profité pour retrouver grâce au dessin celui que je n'arrêtais pas à gribouiller.

Cette rencontre était étrange, comme voir un de mes dessins prendre vie. Quelque chose me troublais, au-delà de la ressemblance parfaite avec mes coups de crayon. Sa façon de se tenir et de parler je l'avais déjà vu. Chez des personnes qui étaient considérées comme des morts-vivants. Tous ceux qui avaient un semblant de vampirisme en eux.

Décidé à ne pas prendre quatre chemin pour obtenir mes réponses je n'hésitais pas une seule seconde au milieu de ce bar où tous étaient occupés ailleurs à exposer mes soupçons. Peut être que c'était les cachets ou mon mauvais caractère qui entrait en scène.

- Vous êtes perspicace. Peut-être un peu trop.

- Je prends ça comme un compliment. Vampire alors, les hérétiques ne peuvent s'empêcher d'essayer de me siphonner ou de faire un tour de magie en guise de réponse.

Une partie de moi était soulagé, j'allais les avoirs mes réponses même si je devais m'écrouler de fatigue et de douleur par la suite. Sentant ma gorge sèche j'avais attrapé le verre du vampire en précisant simplement que je me permettais d'en prendre une gorgée. Ou deux. Le vampire en face de moi émit un sourire.

- Faites donc.

Je ne m'étais pas fait prier. Toute cette histoire me donnait mal à la tête et j'étais tenté de reprendre un cachet. Mais devant le vampire je ne pouvais pas me montrer faible, même si mon allure de zombie ne devait tromper personne. Le vampire cherchait du regard le serveur avant de reprendre la parole.

- Alors, c'est à cause de ça que vous êtes là ?

Je baissais le menton en me saisissant de nouveau du verre. C'était certain que quelqu'un d'un brin attentif allait remarquer mon rictus de douleur, qui crispait mes traits d'un moment à l'autre. Il était perspicace, le vampire ne mettrait pas longtemps à comprendre.

- Ça, les dessins, me renseigner si votre mémoire est intact entre autre.

- Vous pensez que c'est moi le monstre qui vous a fait ça, n'est-ce pas ?

- Une chose est sûre c'est que je me suis pas fait ça tout seul.

Ça n'avait aucun sens je le savais, ce que j'avais à l'épaule ressemblait à un carreau d'arbalète. Pas à une morsure de vampire, le reste de mes plaies étaient semblables à un combat ayant sans doute mal tourné pour moi. Sauf que j'en étais ressortis vivant. Ce qui ne collait pas avec une défaite. Mais si j'avais gagné et que c'était lui mon adversaire il ne serait plus de ce monde. A moins que pour une raison ou une autre, ce vampire était mon ordre de mission du brotherhood. Ce qui expliquerait qu'on soit tout les deux en vies et que je passe mon temps à le dessiner.

- Avez-vous déjà eu à faire au brotherhood ?

Je ne me rappelle pas, mais mon cœur se souvient de toi...

Intrigué, c'était le moins que l'on puisse dire. Voilà des jours qu'il venait ici dans l'espoir de trouver enfin cette chose, cet être qui hantait son esprit et maintenant qu'il était convaincue de l'avoir trouvé – puisqu'il se tenait là, sous ses yeux - étrangement, il peinait à le croire. Pourtant, à la vue des portraits que cet autre lui montrait, et ce, sans même parler du drôle de sentiment de l'impression qui l'avait envahi en le voyant entré pour la première fois dans ce club et qui ne l'avait pas quitté depuis... Il était difficile de penser qu'il en soit autrement.

- Je prends ça comme un compliment. Vampire alors, les hérétiques ne peuvent s'empêcher d'essayer de me siphonner ou de faire un tour de magie en guise de réponse.
— Cette fois, c'est une évidence, vous avez l'œil. Je ne pourrais pas en dire autant de tous vos confrères.

En tant que vampire – un vampire de plus de cinq ans cent, qui plus est – il paraissait évident qu'Archibald avait déjà croisé, plus d'une fois, la route d'un chasseur – certains plus cons et/ou plus extrémistes que d'autres. Mais conscient que les créatures telles que lui pouvaient aisément être perçues de cette même façon, si ce n'était pire encore, Archibald ne leur en tenait pas rigueur. À celui-ci, moins encore. Pourquoi ? Qui était-il ? Que représentait-il pour lui ou, du moins, qu'avait-il pu représenter à ses yeux pour éveiller en lui de tels sentiment ressentis ?

- Ça, les dessins, me renseigner si votre mémoire est intact entre autre.
- Elle ne l'est point, hélas. Je crains donc de ne pas pouvoir vous être très utile ce soir.

Conclut-il avec un soupçon d'amertume dans la voix. Être ainsi dépossédé de ses souvenirs, aussi importants ou fougasses pouvaient-ils être, le rendait particulièrement irascible.

— Une chose est sûre, c'est que je ne me suis pas fait ça tout seul.
— J'en conviens, oui. Mais si vos souvenirs sont aussi flous ou inexistants que les miens, pourquoi conclure que je suis l'auteur de vos douleurs ? Si cette déduction n'est basée que sur vos dessins, remarquables, cela dit, n'est-elle point un peu hâtive ? Je m'avance peut-être à mon tour, mais ne vous était-il point venu à l'esprit que vous auriez me dessiner pour une toute autre raison ?

Minauda-t-il en lui reprenant délicatement le verre de ses mains. Il le porta ensuite à ses lèvres et termina d'une traite ce qu'il restait du liquide ambré en son sein. Ce fut à cet instant précis que le serveur revint avec une bouteille de cet or vieilli en fût de chêne – avec un sens olfactif aussi rodé que le sien, il n'y avait aucun doute possible à émettre sur ce dernier point. Tout droit sorti de leur cave, aimait-il à penser, ledit serveur la bouchonna d'un geste qui se voulait sûr. Mais Archi le congédia avant même qu'il n'ait eu le temps de faire quoi que ce soit d'autre.

— Le brotherhood ? Pas que je sache. J'ai déjà eu affaire à quelques chasseurs au cours de ma vie, mais vous autre brotherhood êtes, comment dire, particuliers ? À moins d'avoir perdu ce souvenir également, je dirais que je me serais rappelé d'une rencontre avec l'un de vos frères.

Expliqua-t-il en remplissant l'unique verre à cette table. Le serveur, méprise ou oublie, n'en avait pas apporté de second. Tant mieux ou pis, ils pourraient toujours continuer à siroter dans le même à verre. Au point où ils en étaient, ils n'étaient sans doute plus à une étrangeté près.

- Puis-je ?

Lança-t-il en lui indiquant du menton la blessure qui saisissait son épaule. Honnêtement, il n'était pas certain d'en être réellement à l'origine, mais il connaissait le genre de blessure qu'il était capable ou d'infliger à un ennemi. Attendant patiemment sa réponse, il lui tendit le verre de bourbon, un peu comme s'il cherchait à lui faire comprendre par ce simple geste qu'il n'y avait aucune hostilité ici, quoi qu'il ait pu se passer – ou ne pas se passer – entre eux.

Codage par Libella sur Graphiorum