La folie passagère - ft. Moïra

Si Moïra n'avait, en vérité, aucun véritable diplôme, elle était une excellente procureur. Ce n'était même pas de l'ego, elle était vraiment douée, par les dons que la nature lui avait fournis, pour révéler la vérité et punir les coupables. Bon, parfois, son mental était mis à rude épreuve, parce qu'il arrivait qu'elle découvre l'innocence d'un suspect, alors même que pour elle, aucun humain n'était innocent. Il lui arrivait parfois de tout faire pour induire la culpabilité d'un innocent, lorsque celui-ci était lavé d'un autre crime commis, mais parfois, elle se retrouvait face à un véritable innocent. Quelqu'un qui, aux yeux des lois humaines, n'avait jamais commis aucun acte délictueux. C'était finalement, pour elle, les cas les plus difficiles. Elle détestait remettre un humain en liberté et ne même pas en faire son dîner ensuite.

Assise à son bureau, se berçant doucement d'un léger mouvement qui faisait tourner de quelques millimètres son fauteuil pivotant. Son esprit dérivait ailleurs, dans un monde de cendre et de flammes, au cœur de son ancienne vie et de ses anciens faits d'armes, quand elle n'avait pas besoin de bureaucratie et de ronds de jambes pour faire payer les coupables. Elle fut interrompue dans sa rêverie par un appel de sa secrétaire. « Oui ? », questionna sommairement Moïra en appuyant sur le haut-parleur. « Maître Haugland est ici. Elle souhaite vous porter le dossier d'une affaire en cours. » Moïra inspira longuement. Brunhilde Haugland était, elle aussi, un être assez particulier. Mi-vampire, mi-sorcière. Une aberration de la nature, le vampirisme étant censé épuiser les pouvoirs magiques d'une sorcière. La Adhams avait découvert récemment l'existence de ces créatures et restait sur ses gardes les concernant. Pour ce qu'elle en savait, pour ces sorciers particuliers, le vampirisme, au lieu de les vider de leur magie, la rendait plus puissante.

« Maître Haugland », la salua Moïra, dès que l'hérétique entra dans son bureau. Elle tendit la main pour se saisir du dossier, si précieux pour l'avocate. Il s'agissait typiquement de l'un de ces dossiers que Moïra détestait, à un détail prêt. La police était intervenue chez les Peterson après un appel du mari à la police, disant être victime de violences de la part de son épouse. Lorsque les policiers étaient arrivés, c'était madame qui portait tous les stigmates de l'agression. En tant que procureur, Moïra avait donc immédiatement poser une accusation sur le mari, alors même qu'elle savait depuis le début que c'était bien la femme, la coupable. Elle devait donc perdre son procès (et elle détestait perdre) pour faire libérer cet innocent, après avoir prouvé son innocence. Or, madame Peterson était vraiment intelligente. Elle avait préparé toutes les preuves possibles contre son mari depuis des mois, à l'insu de celui-ci qui n'avait fait que croire à l'amour que lui portait son épouse. Moïra avait déjà prévu de manger la femme quand tout serait terminé, mais elle cherchait depuis des jours comment sortir gagnante d'un procès qu'elle se devait de perdre. C'était l'unique raison qui faisait que le sujet était toujours d'actualité, car elle possédait déjà les preuves nécessaires pour prouver les malversations de l'épouse. L'opinion publique s'était saisi de l'histoire et les soutiens pour la femme était trop nombreux pour simplement sortir les preuves et mettre fin aux accusations comme cela. Non. Il fallait piéger madame Peterson, pour que ça soit elle qui se trahisse aux yeux de tous.

« Et que va m'apprendre ce dossier ? Quitte à me l'apporter en personne, faites en moi un résumé », commanda Moïra en indiquant le siège de l'autre côté de son bureau pour inviter l'avocate à s'asseoir.